Le Chat forestier en Occitanie

© Laurent Gayral

Depuis juillet 2020, Nature En Occitanie coordonne un programme d’étude piloté sur le massif de la Montagne Noire et les Hautes-Pyrénées sur le Chat forestier (Felis silvestris silvestris).

Le Chat forestier dans le Tarn, une population en danger !

Un félin peu connu et protégé…

Jusqu’à cette étude, il n’y avait aucune donnée prouvant la présence de l’espèce à l’échelle du département du Tarn et du massif de la Montagne Noire, seuls quelques témoignages divers et non documentés étaient recensés depuis les années 1990-2000. À la suite d’une photographie d’un individu de Chat forestier prise dans la forêt départementale des Martys (Aude) en 2016, un groupe de passionnés a voulu vérifier si l’espèce était bien présente. La dynamique créée par cette initiative s’est concrétisée par un programme d’étude coordonné par Nature En Occitanie.

Des études scientifiques pour apporter des réponses…

Deux zones d’étude principales ont été sélectionnées avec l’aide des partenaires techniques locaux, l’Office National des Forêts et le Conseil départemental de l’Aude et ce sont 25 pièges photographiques qui ont été disposés sur ces deux zones. Environ 70 échantillons de poils ont été collectés au cours des 6 mois d’étude et pas moins de 400 clichés ont été réalisés grâce aux appareils automatiques. À la suite des analyses réalisées par le laboratoire de génétique de la conservation de l’Université de Liège, Nature En Occitanie a donc confirmé la présence de Chat forestier dans le Tarn, mais dont la population comporte un très grand nombre d’hybrides avec le Chat domestique. En effet, seulement 30 % sont ressortis forestiers purs contre 70% d'hybrides de 1ère ou 2ème génération.

Vous l’avez compris, une population découverte mais peut-être déjà vouée à disparaître…

Une lignée pyrénéenne plus étendue…

En plus d’avoir mis en évidence cette population de Chats forestiers, le laboratoire « GeCoLab » a cherché à mettre en évidence sa lignée d’appartenance. Grâce à des échantillons pyrénéens et au stock d’échantillons lorrains dont disposait le laboratoire, des comparaisons entre les « trois » noyaux de populations ont pu être effectuées. Les Chats forestiers présents dans le département du Tarn et au sein de la Montagne Noire sont ressortis comme appartenant très majoritairement à la population pyrénéenne.

Après la confirmation de la présence d’une population de Chat forestier de lignée pyrénéenne dans le département du Tarn et le massif de la Montagne Noire, Nature En Occitanie (NEO) a voulu comprendre et illustrer le déplacement du félin entre les Pyrénées et le sud du Massif central.

Le Chat forestier, une espèce en mouvement en Occitanie

Un travail préparatoire a permis d’identifier 2 potentiels corridors écologiques entre les Pyrénées et la Montagne Noire :

• Un premier corridor, à l’Ouest de Carcassonne, permettant un échange entre les Pyrénées audoises, le Razès, le massif de la Malepère et la Montagne Noire après la traversée de l’Autoroute A61.
• Un second corridor, à l’Est de Carcassonne, permettant un échange entre les Pyrénées audoises, les Corbières, le Minervois et la Montagne Noire après la traversée de l’Autoroute A61.

30 pièges photographiques ont été disposés et répartis, pendant 5 mois, dans les deux corridors écologiques supposés et sous 7 passages de l’A61 en collaboration avec Vinci Autoroute. Après 5 mois d'étude, grâce au protocole d’étude et aux analyses génétiques, nous savons aujourd’hui que les Chats forestiers effectuent des échanges entre les Pyrénées audoises et la Montagne Noire en transitant par le Razès, la Malepère puis en utilisant les passages de l’Autoroute situés à l’ouest de Carcassonne pour traverser et atteindre les espaces naturels pyrénéens ou du Massif central. Seul le corridor écologique situé à l’ouest de Carcassonne a pu être démontré. Cette étude démontre également que les passages à faune utilisés par le Chat forestier au niveau de l'A61 sont des ouvrages connectés avec des réseaux de trames vertes et bleues fonctionnels ( corridors de déplacement en bon état écologique).

L'étude a également été réalisée dans les Hautes-Pyrénées au nord de l'autoroute A64 avec l'installation de 6 pièges photographiques et de brosses à poils. Après 5 mois d'étude, plusieurs clichés de Chat forestier ont donc pu être réalisés sous 2 des 3 passages à faune étudiés. Puis, de très nombreux Chats d’apparence forestière ont aussi été détectés dans les forêts communales équipées. Grâce à l’échantillon de poils, nous pouvons affirmer qu’une population de souche pure de Chats forestiers est présente sur le piémont des Hautes-Pyrénées. Cette étude, nous permet également d’avancer que l’A64 est franchissable par l’espèce au niveau de Lanespède.

En 2024, des prospections ont également été menées sur le massif de la Grésigne (Tarn) et dans l’Astarc (Gers) afin de poursuivre les investigations sur la répartition de l’espèce et l’utilisation des corridors forestiers. Aucun chat n’a été détecté en Grésigne mais un individu phénotypé forestier a été photographié dans le Gers, illustrant d’avantage le rôle de ces corridors pour le maintien des espèces forestières.

Le programme doit se poursuivre en 2025 sur l’étude de la zone charnière entre les populations de lignée lorraine et celles de lignée pyrénéenne, potentiellement située dans le Haut-Languedoc (Tarn/Hérault).

La visibilité sur le programme d'étude sur le Chat forestier permet également d'améliorer les connaissances sur les aires de répartition de l'espèce grâce à la remontée de données de présence d'observateurs externes.

Comment agir pour protéger le Chat forestier ?

Pour préserver cette population de Chat forestier, il est aujourd’hui très important de limiter la divagation du Chat domestique afin d’éviter l’hybridation des deux espèces. En s’appuyant sur la stérilisation, nous pouvons aujourd’hui contrôler la population du Chat domestique et donc réduire l’impact sur la biodiversité. En effet, le Chat domestique prédate chaque année de nombreuses espèces sauvages et vient nuire à la conservation du Chat forestier en s’hybridant avec ce dernier. La surpopulation de Chat domestique impacte également le bien-être de nombreux d’entre eux, qui livrés à eux-mêmes, souffrent de malnutrition et de maladies.

Aujourd’hui, sans actions de notre part, la population de Chat forestier présente en Montagne Noire – à peine découverte- est potentiellement vouée à disparaître.